« Rosette, Claire, Claude. Mon arrière-grand-mère, ma grand-mère, ma tante. Toutes trois descendent des barons de Menasce, illustre famille de l'aristocratie juive d'Alexandrie. Longtemps, j'ai regardé cette famille, son histoire, comme n'étant pas la mienne. Jusqu'au jour où j'ai eu envie de faire connaissance.
Rosette est la baronne Félix de Menasce. Une Franco-Espagnole sortie on ne sait comment de la pauvreté à la fin du XIXe siècle. Aux yeux de la "bonne société" d'Alexandrie où elle prend soudain place, cette belle catholique convertie reste un corps étranger. Elle amuse les hommes, les femmes un peu moins.
Claire sa fille, c'est une autre affaire. Si elle s'est coupé les cheveux dès les années 1920, ce n'est sans doute pas un hasard. Spirituelle et brillante, elle voit le siècle changer, l'Égypte colonisée s'agiter. Pendant la Seconde guerre mondiale, elle aide les Forces françaises libres et serait devenue la maîtresse du général Catroux, l'un des premiers soutiens de De Gaulle.
Claude enfin, dont la beauté et le talent n'empêchent pas la vie tragique. Elle épouse l'écrivain britannique Lawrence Durrell, fort buveur et futur auteur du Quatuor d'Alexandrie. Du fait que Claude écrive elle aussi, je n'avais jamais entendu parler dans mon enfance.
La grand-mère, la fille et la petite-fille tissent notre légende d'Alexandrie : un monde laissé en arrière dont les échos des rires, des bals et des guerres résonnent encore dans les albums photo. Trois Alexandrines pour retrouver le fil de cette légende, traverser le siècle d'Alexandrie la cosmopolite, son ascension, son apogée, son déclin. Je retrace leur histoire et dans ces retrouvailles une évidence s'impose. J'étais d'Alexandrie et je ne le savais pas. »
Sibylle Vincendon Petit traité des villes à l'usage de ceux qui les habitent Vous croyez que vous ne comprenez rien à l'urbanisme, que c'est un domaine réservé aux politiques, aux architectes et aux marchands de béton? Pourtant vous circulez dans la ville, vous utilisez ses équipements: la gare, l'hôpital, le lycée; vous admirez la beauté de certains quartiers, vous déplorez la laideur de certaines constructions. C'est en ville que vous travaillez, que vous aimez, que vous évoluez. Sans même y réfléchir, c'est là où vous avez vos racines, c'est là que vous construisez votre vie. C'est même là où vous votez.
Il est temps de vous réapproprier votre ville. Pour ne pas la laisser aux seules mains des technocrates et des promoteurs. Il vous manquait juste un Petit traité des villes à l'usage de ceux qui les habitent. Un livre sensible, accessible, indispensable.
Sibylle Vincendon est rédactrice en chef adjointe à Libération. De 2003 à 2007, elle a conçu et coordonné les cahiers «Villes» mensuels.