Au lendemain de la guerre de 1914, Yvonne Vierne, jeune femme intrépide, crée à Paris La Porte étroite, une petite librairie située au 10 rue Bonaparte, spécialisée dans la bibliophilie, l'art et la poésie. Elle y fait la rencontre de Henri-Pierre Roché, le futur auteur de Jules et Jim, grand ami des peintres et grand collectionneur, qui l'introduit dans un monde pour elle fascinant, celui de la modernité littéraire et artistique parisienne.
Très vite, sa librairie devient le centre autour duquel gravite toute l'avant-garde - Gide et Roché, bien sûr, mais aussi Picasso, Derain, Dufy... Jusqu'au jour où un beau jeune homme pousse la porte de sa boutique : c'est le coup de foudre, et bientôt un mariage d'amour qui la fait entrer dans la grande bourgeoisie parisienne mais l'oblige, la mort dans l'âme, à abandonner sa librairie. Pour sa belle-famille, très conservatrice, il est en effet inconcevable de la laisser continuer son activité.
Mais si elle accepte ce changement radical d'existence, Yvonne ne peut renoncer à son goût pour l'art : elle se met à collectionner des artistes de son temps, et en particulier un certain Sanyu, peintre chinois alors totalement inconnu, dont les Chrysanthèmes roses dans un vase blanc, beaucoup plus tard, à l'heure de sa gloire, aideront sa famille à surmonter les multiples épreuves que lui réserve la vie.
Célèbre et célébrée très jeune dans toute l'Europe, Madame Vigée Le Brun occupe une place de choix dans l'histoire de la peinture du XVIII? siècle. Portraitiste attitrée de la reine Marie-Antoinette, elle a tenu au bout de son pinceau toute la société aristocratique qui brillait à Versailles de ses derniers feux, tous les grands personnages de l'émigration et des cours de Naples, Vienne et Saint-Pétersbourg. Mais on rencontre aussi dans la galerie de portraits qu'elle a laissée, des peintres, ses amis, des comédiens, des musiciens, de jolies femmes aimées pour leur beauté. Vers la fin de sa vie, en plein romantisme, période où elle ne retrouvait pas la sensibilité qui avait été la sienne, elle a écrit des Souvenirs, aussi intéressants par ce qu'ils cachent que par ce qu'ils racontent. Pour faire le portrait de la portraitiste, il fallait aller plus loin : percer le mystère de la personne, découvrir au-delà de l'apparence plus que grâcieuse ce qui pourra la rendre plus vraie. C'est à quoi nous convie Françoise Pitt-Rivers, en retraçant le parcours d'une femme d'exception dans l'Europe française de la fin des Lumières, au temps de la douceur de vivre.
Le monde entier est atteint d'angelicamania, disait-on à Londres en 1777, en désignant Angelica Kauffmann (1741-1807), cette jeune femme peintre venue de Suisse via l'Italie, qui avait conquis par son charme et son pinceau toute la société britannique et, au-delà, toute l'intelligentsia européenne.
Que reste-t-il aujourd'hui des manifestations de cet extraordinaire enthousiasme ? L'oeuvre d'un grand peintre, qui mérite de retrouver la lumière des projecteurs. Cette première biographie française arrive donc à point pour redonner à Angelica Kauffmann la place qui lui revient dans l'histoire de l'art. Sa vie est un véritable roman. Née dans une famille modeste des Grisons, elle a connu une ascension sociale vertigineuse et a su s'imposer dans un monde dominé par les hommes pour faire, en Angleterre comme à Rome, une carrière éblouissante de portraitiste et de peintre d'histoire.
Elle a peint pour les cours d'Angleterre, de Naples, de Vienne, et même de Saint-Pétersbourg. Elle a appartenu à toutes les académies d'Italie et compté parmi les membres fondateurs de la Royal Academy. Elle a connu la gloire, mais, comme Mme de Staël, " au détriment du bonheur ". Le parcours de cette vie, jalonné de rencontres avec l'élite de son époque : Winckelmann, Reynolds, et surtout Goethe, son plus fervent admirateur (" Elle a un talent incroyable ", écrivait-il), est rempli de mystères sentimentaux - mariage secret, amour déçu...
- qui font de cette femme exceptionnelle une figure touchante d'artiste auréolée de mélancolie.
Un portrait que vous avez toujours vu au mur de votre appartement. Il a été peint au début de la Révolution à Paris. La composition en est harmonieuse, la facture classique, tout y respire la joie simple et paisible d'une vie de famille très Ancien Régime. Et pourtant... Quand le hasard vous met dans les mains le journal écrit par l'homme représenté sur le tableau, celui-ci se met à révéler ses secrets. C'est alors une tout autre histoire qui se fait jour.
Car ce journal, c'est celui de Jean Lacoste, un homme qui vient de la campagne et qui avoue sans détour son ambition de grimper l'échelle sociale. Dans un style ingénu, il décrit les étapes de sa métamorphose : son enfance dans un petit village du Quercy, sa découverte, en tant que jeune clerc, de Paris et d'une société brillante au sein de laquelle il croisera plusieurs personnages historiques, son arrivée à Lyon où la Grande Fabrique, en lui révélant à la fois un métier, celui du tissage de la soie, et un art, celui du décor, lui fera abandonner la cléricature pour le négoce.
On suit avec bonheur le récit de ces années d'apprentissage, qui sont également celles d'une éducation sentimentale jalonnée de séduisantes figures féminines. Elles le mèneront à occuper une position enviable, celle d'un citadin élégant dont la fortune est faite. Car à en croire son journal, notre héros semble enfin avoir trouvé une place dans cette classe privilégiée à laquelle il rêvait d'appartenir. Mais à jouer les marquis en se faisant portraiturer dans son beau salon parisien, Jean Lacoste ne s'approche-t-il pas dangereusement de la guillotine ?